Le darss du Tarâwîh – 9

Le darss du Tarâwîh – 9

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19 août 2010, 15:48

Bismillâhir Rahmânil Rahîm

(Le darss de ce jour reprend un de nos discours datant de 2002 et publié ici : http://www.muslimfr.com/modules.php?name=News&file=article&sid=304 )

 

Légalement, on définit généralement la mort comme étant l’arrêt irréversible de toute activité cérébrale. En d’autres mots, l’unique critère permettant de déterminer l’interruption de la vie scientifiquement, c’est la perte définitive (et de façon irréversible) des fonctions vitales.

A cette considération scientifique, nos références religieuses nous apprennent qu’il nous est indispensable de prendre également en considération un autre critère si nous voulons exprimer correctement ce que représente la vie pour nous : il y a en effet une “énergie” qui est tout aussi vitale à nos yeux que l’activité cérébrale, en ce sens que, si celle-ci nous fait défaut, tout en étant vivant, au sens scientifique, légal et courant du terme, on n’existe pas vraiment. Notre existence, sans cette “force vitale”, ne mérite pas d’être considérée comme une vie à part entière, à la lumière de nos références…

Cette énergie vitale complémentaire et indispensable dont nous avons besoin, c’est celle de la spiritualité, qui est nourrie par la Révélation Divine et les œuvres pies.

 

Dans un verset du Saint Qour’aane qui a été récité au cours du Tarâwîh d’hier soir, Allah nous interpelle justement au sujet de cette énergie vitale. Il dit:

يَا أَيُّهَا الَّذِينَ آمَنُواْ اسْتَجِيبُواْ لِلّهِ وَلِلرَّسُولِ إِذَا دَعَاكُم لِمَا يُحْيِيكُمْ وَاعْلَمُواْ أَنَّ اللّهَ يَحُولُ بَيْنَ الْمَرْءِ وَقَلْبِهِ وَأَنَّهُ إِلَيْهِ تُحْشَرُونَ

“Ô vous qui croyez ! Répondez à Allah et au Messager lorsqu’il vous appelle à ce qui vous donne la (vraie) vie, et sachez qu’Allah s’interpose entre l’homme et son coeur, et que c’est vers Lui que vous serez rassemblés.”

(Sourate 8 / Verset 24)

 

Dans ce verset, l’expression “ce qui vous donne la (vraie) vie” a été interprétée différemment par les commentateurs du Qour’aane: selon certains, celle-ci fait allusion à la foi – Imân; selon d’autres, elle fait référence à l’Islam; selon d’autres encore, elle désigne le Qour’aane…

 

Pour concilier et synthétiser toutes ces interprétations, on peut dire que cette “énergie vitale” auquel le verset fait allusion, elle se compose aussi bien de la Révélation Divine que de l’ensemble des œuvres pies, qui alimentent bien évidemment la spiritualité de l’être humain, et lui permettent de mener une existence “pleine”, digne, agréable et sensée. C’est justement pour cette raison que, dans le Qour’aane, la Révélation Divine a été qualifiée de “Roûh”, d’âme et d’esprit. (Voir par exemple le verset 42 de la Sourate 52)

 

Lorsque cette Révélation et l'”énergie vitale” qu’elle porte et entretient fait défaut à un être humain, c’est la vie entière qui perd son sens et sa réalité profonde. Et cela, on peut en être persuadé quand on prend en considération deux faits, l’un positif, l’autre plutôt négatif:

 

1) D’un côté, quand on considère nos enseignements religieux et nos Références, on constate qu’ils donnent un sens à chaque élément de la Création qui nous entoure, à chaque attitude que nous adoptons, à chaque geste que nous faisons, aussi banal et routinier qu’il puisse être en apparence… Ce n’est pas sans raison que le Qour’aane nous invite si souvent à l’observation et à la méditation sur la création qui nous entoure -et dont nous faisons nous mêmes partie intégrante, sur la réflexion par rapport aux événements historiques qui nous ont précédés etc. : c’est justement parce que chaque chose, chaque élément, chaque événement est pour nous porteur d’un rappel, d’un signe, d’un message, d’un conseil, d’une guidée, d’une orientation… qui nous ramène vers le Souvenir du Très Haut et du Tout Puissant, tout en nous permettant d’y voir un peu plus clair dans notre existence présente, et de mieux comprendre ainsi le sens de notre vie sur cette terre. C’est bien pour cela également que, pour le musulman, tout peut prendre une dimension “sacrée” et apporter des récompenses, mêmes les actes les plus courants de la vie de tous les jours: manger, boire, dormir, s’habiller, travailler, avoir des relations intimes avec son épouse… Tout cela peut revêtir une dimension rituelle et de Ibâdah, en fonction de l’intention suivant laquelle l’acte en question est accompli. Mieux encore: les difficultés et les événements tristes qui affectent le musulman, qu’il s’agisse d’une blessure, d’un souci passager lié à la perte de quelque chose, d’une souffrance plus profonde découlant de la perte d’un être qui nous est cher,… toutes ces situations, si elles sont “gérées” comme le Prophète Mouhammad (sallallâhou alayhi wa sallam) l’a enseigné, peuvent devenir pour le musulman autant de “tremplins” qu’il peut utiliser pour se rapprocher d’Allah. Et cette métamorphose justement, qui donne un sens, une fonction, un rôle, une importance et un but à chaque chose, elle s’opère par l’intermédiaire de l'”énergie vitale” de la spiritualité, alimentée par la Révélation.

2) D’un autre côté, quand on fait preuve d’objectivité et d’esprit critique, on se rend compte que l’affaiblissement ou la perte de cette”énergie vitale” de la spiritualité et de l’attachement à la Révélation Divine entraîne souvent la disparition, partielle ou totale, de notre conscience et de notre volonté propres: lorsque la lumière et la vitalité spirituelle faiblit chez l’être humain, celui-ci devient sujet à un effacement progressif de sa personnalité, pour se “fondre”, se “diluer” et se “dissoudre” complètement dans l’environnement matérialiste dans lequel il baigne. Ainsi, peu à peu, il n’est plus vraiment maître de sa volonté, de ses choix, de ses désirs, de son existence… Il se transforme en un simple imitateur, pour ne pas dire un pantin, qui ne fait que s’imprégner et reproduire les comportements, les attitudes et les réactions qu’il perçoit autour de lui, qui n’agit qu’en fonction des intérêts qui lui sont dictés par des éléments “extérieurs”: il devient ainsi l’esclave de la richesse et des biens matériels, l’esclave du dirhâm et du dînâr –“abd oud dînâr wad dirham”, pour reprendre une expression du Prophète Mouhammad (sallallâhou alayhi wa sallam)-, mais également l’esclave de la publicité et des techniques de marketing, l’esclave des médias, l’esclave de la mode, l’esclave de ses pulsions malsaines, qui finissent par le dominer… En s’éloignant ainsi de la servitude-‘abdiyah– envers Son Créateur -servitude qui, aussi paradoxal que cela puisse paraître, lui garantit une existence pleine et une vie digne de ce nom-, il sombre dans un système où il devient l’esclave de tout et de n’importe quoi: et quand on observe une telle personne avec les yeux du cœur et de la conscience, on ne peut s’empêcher de comparer son comportement à celui d’un cadavre ambulant… quelqu’un qui est vivant, au sens scientifique du terme, mais qui, spirituellement, est complètement éteint. Alors que, à l’opposé, l'”énergie vitale” de la spiritualité, lorsqu’elle atteint sa plénitude, peut devenir tellement puissante qu’elle garantit l’existence, même après la mort physique et l’arrêt irréversible de l’activité cérébrale… En effet, lisez donc ce qu’Allah Lui-même Il dit, en s’adressant aux croyants:

“Et ne dites pas de ceux qui sont tués dans le sentier d’Allah qu’ils sont morts. Au contraire ils sont vivants, mais vous en êtes inconscients.”

(Sens du Verset 54 de la Sourate 2)

Voilà donc pourquoi la “vitalité spirituelle” est si indispensable pour nous musulmans: efforçons nous de profiter de ces moments bénis que nous vivons pour renforcer cette énergie vitale, en l’alimentant de la Révélation Divine et des œuvres pies… pour essayer de redonner, enfin, un sens à notre vie

 

Wa Allâhou A’lam !